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Croire, Agir, Ajuster : Leçons de mon parcours entrepreneurial au Cameroun
Accroche – Le matin où j’ai dit la vérité à 200 étudiants
L’auditorium bourdonnait déjà avant même que je n’entre. C’était un jeudi matin humide à Douala — ce genre de matin où la ville s’éveille lentement, l’air encore lourd de la nuit passée, et les rues déjà en mouvement : chauffeurs de taxi appelant les passagers, vendeuses disposant leurs plateaux de beignets et de puff-puff, l’odeur de la friture se mêlant à celle du café fort.
À l’intérieur de l’IUT de Douala, près de deux cents étudiants étaient assis, cahiers et téléphones à portée de main. Ce rendez-vous faisait partie du programme de mentorat de l’école, où des professionnels viennent partager leur expérience avec la nouvelle génération.
J’ai pris le micro, souri, et regardé la salle.
Dans leurs yeux, je lisais de l’attente — un mélange de curiosité et d’ambition.
La plupart des intervenants commencent par leurs titres, leurs réussites, et un parcours bien poli. J’ai choisi une autre voie.
« En tant qu’entrepreneur au Cameroun, vous devez moins vous concentrer sur les revers et garder les yeux fixés sur le but. Certains appellent cela la résilience, d’autres la persévérance… ici, nous appelons ça Hemlé. »
Des têtes ont hoché, d’autres se sont inclinées, comme pour se demander : Hemlé ?
J’ai expliqué : le Hemlé est plus qu’une simple détermination. C’est cette force profonde, presque têtue, qui vous pousse à continuer même lorsque toutes les raisons logiques vous disent d’arrêter.
Ce jour-là, je ne voulais pas faire un discours de motivation aux fins heureuses. Je voulais qu’ils entendent la vérité — la vérité sur ce que cela signifie de construire quelque chose de significatif ici, dans un système qui, parfois, semble travailler contre vous.
Mon parcours – De Houston à Douala
Il y a huit ans, j’ai pris une décision qui allait changer ma vie.
J’ai quitté Houston, Texas, où j’avais une carrière solide, un environnement prévisible et l’accès à des opportunités dont beaucoup rêvent, pour revenir au Cameroun.
Pas pour de courtes vacances. Pas pour un « on verra bien ». Mais pour m’installer et bâtir.
Quand j’ai annoncé mon choix à mes amis et collègues aux États-Unis, les réactions n’ont pas tardé :
« Pourquoi troquer la stabilité contre l’incertitude ? »
« Pourquoi quitter un système qui fonctionne pour un autre où tu devras te battre pour chaque mètre ? »
« Pourquoi ne pas simplement aider à distance ? »
Ma réponse était simple : parce que mon pays a encore un potentiel inexploité, et je voulais contribuer à le révéler.
Je savais que ce ne serait pas facile. J’avais entendu des histoires. Mais entre entendre et vivre, il y a un monde.
Les obstacles – La réalité du terrain
Mes premiers mois au Cameroun ont été comme un jeu sans mode d’emploi clair — où les règles changent en cours de partie et, parfois, l’arbitre ne se présente même pas.
Les labyrinthes administratifs
Ici, les démarches ne sont jamais de simples formalités — ce sont de véritables marathons. Des processus qui ailleurs prennent quelques heures peuvent ici durer des semaines, voire des mois. Et si vous ne relancez pas, certains dossiers disparaissent dans des tiroirs invisibles.
Les complications douanières
Importer du matériel pour mes projets aurait dû être simple. À la place, j’ai dû multiplier les déplacements au port, naviguer entre frais variables et exigences de dernière minute. Résultat : des projets urgents retardés et des coûts qui grimpent.
Les surprises locatives et fiscales
Des baux qui changent soudainement. Des avis d’imposition qui ne correspondent pas à ce qui était prévu. J’ai appris à lire entre les lignes et à documenter chaque détail.
Les défis humains
Des employés qui partent à des moments critiques. Des partenaires qui disparaissent après avoir obtenu leur part. Des incompréhensions dues à des cultures de travail différentes.
Ces coups venaient de toutes les directions — parfois tous en même temps. Il y a eu des nuits où je me suis demandé :
Ai-je fait la plus grosse erreur de ma vie ?
Les tournants – Changer de posture mentale
Avec le temps, j’ai compris une chose : Les obstacles ne disparaîtront pas. L’environnement ne se pliera pas à mes attentes.
Deux choix s’offraient à moi :
Attendre des conditions parfaites et risquer de stagner.
Faire plus avec ce que j’avais, dès maintenant.
J’ai choisi la deuxième voie.
Ce changement d’état d’esprit a tout transformé. Au lieu d’être paralysé par ce qui me manquait, j’ai commencé à maximiser ce qui était déjà à ma portée.
Quand un contrat tombait à l’eau, je cherchais une autre approche. Quand un partenariat tournait mal, je ne renonçais pas à la collaboration — je bâtissais de meilleurs accords, plus clairs, et je choisissais des partenaires dont la vision correspondait à la mienne.
Ce n’était pas éviter les revers. C’était les absorber, apprendre, et me réajuster.
Ma philosophie – Croire, Agir, Ajuster (CAA)
De ces expériences est née ma devise : Croire, Agir, Ajuster.
Croire
Vous devez d’abord croire en votre vision — pas de façon superficielle, mais assez profondément pour qu’elle devienne votre ancre. Quand la tempête gronde, la croyance est la corde qui vous retient au quai.
Pour moi, croire signifiait tenir à ma mission : construire des plateformes et des écosystèmes reliant idées, talents et capitaux à travers l’Afrique.
Agir
La croyance sans action n’est qu’un rêve. J’ai vu des gens rester éternellement sur la ligne de départ, attendant que tout soit prêt. La vérité ? Rien n’est jamais totalement prêt.
Agir, pour moi, c’était lancer Africa Venture Group malgré des conditions imparfaites, démarrer EkoTech, Immigration 360 Degré et MyDoc.cm même lorsque les chiffres me disaient d’attendre.
Ajuster
Aucun plan ne survit intact à la réalité. Les marchés changent. Les personnes évoluent. Des obstacles surgissent. La clé est de pivoter sans perdre de vue votre cap.
Pour moi, ajuster signifiait revoir mes modèles d’affaires, réorganiser mes équipes, ou encore modifier ma stratégie d’entrée sur un marché selon les circonstances.
Leçons universelles – Au-delà des frontières
Ce que j’ai appris au Cameroun s’applique partout :
L’adversité est universelle — qu’il s’agisse de retards logistiques à Douala ou de saturation de marché à New York.
L’état d’esprit dépasse l’infrastructure — un entrepreneur ingénieux peut transformer la rareté en opportunité.
Les partenariats exigent de la clarté — la confiance se construit sur la transparence et des objectifs communs.
Histoires dans l’histoire
Il y a eu ce projet où les douanes ont bloqué notre contenaire. Nous avons improvisé, réutilisé des outils plus anciens… et livré dans les temps. J’ai appris que l’innovation naît souvent de la contrainte, pas du confort.
Il y a eu ce partenariat qui s’est effondré à la dernière minute. La perte était douloureuse, financièrement et personnellement. Mais avec le recul, c’était un filtre : il m’a poussé à renforcer mes processus de sélection et à évaluer le caractère autant que les compétences. Sans oublier les factures impayés de l’administration !
Appel à l’action – Jouer le long terme
Lorsque je suis retourné à l’IUT ce jour-là, j’ai conclu mon intervention par :
« Vous pouvez Croire, Agir et Ajuster… et ne pas ‘réussir’ selon la définition de quelqu’un d’autre. Mais vous apprendrez. Et cet apprentissage est déjà une réussite en cours. »
Je crois sincèrement que la réussite n’est pas un point final. C’est un processus évolutif. Chaque échec surmonté, chaque pivot réussi, chaque leçon intégrée — ce sont des jalons.
Alors, où que vous soyez et quoi que vous construisiez : N’attendez pas le moment parfait. Ne laissez pas les revers vous définir.
Commencez avec ce que vous avez. Utilisez ce que vous savez. Apprenez en avançant. Et quand la route change sous vos pieds, ajustez vos pas, mais jamais votre destination.
Citation finale : « La résilience, ce n’est pas éviter l’orage — c’est apprendre à danser sous la pluie. »